II – Ce çloka revient sur la pensée précédemment exprimée, et la développe encore
C’est en raison de distinctions de ce genre : telle chose est bleue ou jaune, grossière ou subtile, courte ou longue, etc…, que l’œil, en tant qu’unité, perçoit la multiplicité des formes.
COMMENTAIRES
Les formes sont des objets de perception qui changent incessamment. Seul est permanent, seul ne change pas, le sujet qui perçoit. Les multiples objets paraissent, sans doute, être distincts les uns des autres, mais, s’ils sont perçus dans leurs changements successifs, c’est que l’œil est lui-même une unité de perception. Ils appartiennent tous à la même catégorie : en bloc, ils constituent le spectacle. Et, par rapport aux objets, l’œil est bien le spectateur.
Tous les objets ont une caractéristique commune : le changement ; or, le changement ne peut s’opérer que dans les choses qui sont imaginées à propos d’un substrat, ce qui est, par exemple, le cas pour le serpent, le filet d’eau, le bâton, la guirlande, etc…, qui sont vus, par erreur, là où n’existe qu’un simple morceau de corde. Toutes ces idées ont sujettes au changement.
Au contraire, le Spectateur a pour caractéristique d’être immuable. Les objets changent, mais le sujet qui les perçoit, reste toujours le même. Les apparences : celles du serpent, du filet d’eau, du bâton, etc… passent, mais le morceau de corde qui en est le substrat, demeure ce qu’il n’a jamais cessé d’être : c’est toujours le même morceau de corde.
N d. T. : L’idée exprimée dans les quatre premiers çlokas est que le spectateur possède, à tous les échelons, un caractère d’unité par rapport a l’ensemble du spectacle. Le percevant est l’Unité Elle-même, et c’est en l’Unité que la multiplicité a toute sa réalité.
Aux degrés inférieurs qui sont d’abord envisagés, cette unité n’est que relative ; c’est, pourrait-on dire, une unité par participation — plus ou moins directe — à l’âtman. L’âtman est, en effet, la seule véritable unité, et toute unité relative n’en est, en quelque sorte, que le reflet.