(10) Section IV : La génération de l’homme et les puissances de son âme. Définition de l’intellect hylique
Lorsque les éléments se mélangent d’une façon très proche de l’équilibre, l’homme advient. En lui, l’ensemble des puissances végétatives et animales se rassemblent et cet ensemble s’accroît d’une âme qui est nommée « rationnelle ». Elle possède deux puissances : une puissance saisissante, savante, et une puissance motrice, pratique. (15) La puissance saisissante et savante a en propre les universels purs tandis que la puissance motrice et pratique a en propre ce qu’il est de la nature de l’homme de faire. Ainsi celui-ci découvre-t-il les diverses techniques humaines et croit-il à l’horrible et au beau en ce qu’il fait et abandonne. Cela, de même que la puissance contemplative croit au vrai et au faux en ce qu’elle considère. Pour chacune de ces deux puissances, il y a une opinion et une croyance. L’opinion constitue la faiblesse d’un acte tandis que la croyance en constitue la puissance. La puissance active s’assimile aux habitudes, elle réfléchit aux arts, elle choisit, pour agir, le bien (20) ou ce dont elle a l’opinion que c’est le bien. Lui sont dues l’astuce, la sottise, la sagesse pratique qui est leur intermédiaire et, en somme, l’ensemble des actions humaines. Elle demande beaucoup l’aide de la puissance contemplative. Ainsi, il y a chez le contemplatif la vision universelle et, chez le pratique, la vision particulière préparant à ce qui est faisable.
Quant à la puissance contemplative, elle comporte divers rangs. Le premier de ces rangs, c’est d’être une disposition, disposition de l’âme (97,1) et non du corps, ni de la complexion du corps. Cette disposition correspond aux intentions intelligibles universelles. Dans les Livres de logique et dans ceux de physique, on a exposé, en deux examens et selon deux visées différentes, ce qu’est la forme intelligible et ce qu’est la forme sensible, ce qu’est l’universelle et ce qu’est la particulière, comment les intelligibles universels adviennent en cette puissance. (5) Cette disposition est une puissance de l’âme ; on la nomme « intellect hylique » et « intellect en puissance ». Elle est nommée « intellect hylique » pour la raison suivante seulement : de même que les corps ont une hylè qui n’a absolument aucune forme mais de la nature de laquelle il est de recevoir toute forme sensible, ainsi y a-t-il dans les âmes une hylè qui n’a absolument aucune forme mais qui reçoit toute forme intelligible. Si elle avait en propre une forme sensible, elle ne serait pas bonne pour recevoir les formes intelligibles ainsi que nous allons bientôt l’exposer. Si elle avait en propre une forme (10) intelligible, elle n’en recevrait point d’autre d’une façon régulière, comme la tablette sur laquelle il est déjà écrit. Au contraire, cette puissance est dans l’âme une pure aptitude à recevoir toutes les formes.