Balzac (Séraphita) – caminho que leva ao céu

destaque em espanhol

– Si queréis entrenar vuestros pies para marchar por el sendero que lleva al Cielo, sabed que los comienzos son de extrema rudeza, dice este alma dolorida. Dios desea ser buscado por sí mismo. En este sentido, está celoso y os quiere todo entero, pero cuando os dais a él, jamás os abandona…

…Todos los seres pasan una primera existencia en la esfera de los instintos en donde trabajan para reconocer la inutilidad de los tesoros terrestres tras haber gastado mil trabajos reuniéndolos. Cuántas veces se mora en este primer mundo antes de salir preparado para volver a comenzar otras pruebas en la esfera de las abstracciones en donde el pensamiento se ejercita en las falsas ciencias, donde el espíritu se libera por fin de la palabra humana; porque una vez agotada la materia se presenta el espíritu. Cuántas de las formas prometidas al cielo han sido utilizadas antes de llegar a comprender el precio del silencio y de la soledad, de la que las etapas estrelladas son el pavimento de los mundos espirituales. Después de haber experimentado el vacío y la nada, los ojos se vuelven hacia el buen camino. Es entonces cuando otras existencias a utilizar son precisas para pisar el sendero en el que brilla la luz. La muerte es el descanso de este viaje. Las experiencias se hacen entonces en sentido inverso: es preciso con frecuencia toda una vida para adquirir las virtudes que son el polo opuesto de los errores en los que el hombre ha vivido precedentemente. Viene a continuación la vida en la que se sufre y en la que las torturas dan sed de amor. En seguida la existencia en la que se ama y en la que la devoción por la criatura toma la forma de devoción hacia el creador, ahí están las virtudes del amor, sus mil mártires, su angélica esperanza, sus alegrías seguidas de dolores, su paciencia, su resignación, excitan el apetito de las cosas divinas. Sigue la vida en la que se buscan, en el silencio, los trazos de la palabra, en la que se convierte en humilde y caritativo. Después la vida, en la que el deseo es muy intenso, y por último, la existencia en la que se ruega. Allí está el eterno mediodía, allí las flores y la cosecha. Las cualidades adquiridas, y que se van desarrollando lentamente en nosotros, son los lazos invisibles que unen cada una de nuestras existencias unas con otras, y el alma es la única que las recuerda, porque la materia no puede rememorar ninguna de las cosas espirituales. El pensamiento sólo tiene la tradición de la anterior. Este legado perpetuo del pasado al presente y del presente al futuro es el secreto de los genios humanos: unos poseen el don de las formas, otros el don de los números, éstos el de las armonías. Éste es el progreso por el camino que conduce hacia la luz. Sí, quien posee uno de estos dones contacta con el infinito en un punto. La palabra, sobre la que os he revelado aquí algunas cosas, la tierra se les ha distribuido, y en ella, reducida a polvo, la ha sembrado en sus obras, en sus doctrinas, en sus poemas…

…La última vida, aquella en la que se resumen las otras, en donde se tienden todas las fuerzas y todos los méritos, debe abrir la puerta santa al ser perfecto, es la vida del rezo. ¿Quién podrá haceros comprender la grandeza, la majestad, la energía de la oración? ¡Que mi voz resuene en vuestros corazones y los cambie y logréis de un solo golpe conocer lo que seréis tras las pruebas! Hay criaturas privilegiadas, profetas, videntes, enviados, mártires, todos los que sufren por la palabra o que la han proclamado; estas almas franquean de un solo paso las esferas humanas y se elevan con un solo y gigantesco paso hasta las alturas de la oración. Así sucede con los que se ven devorados por el fuego de la fe. Sed uno de estos matrimonios intensos. Dios sufre la temeridad, le agrada el ser tomado violentamente y no rechaza jamás al que puede acercarse a él. ¡Sabedlo!, el deseo, este torrente de vuestra voluntad, es tan poderoso en el hombre, que un solo tiro lanzado con fuerza puede lograrlo, un solo grito basta con frecuencia actuando bajo la presión de la fe. Venced a la tierra, que la sed y hambre de Dios os sean suficientes. Corred hacia él, como el ciervo sediento se encamina a la fuente; el deseo os prestará alas, las lágrimas, esas flores del arrepentimiento, serán como un bautismo celeste del que saldrá purificada vuestra naturaleza. Liberaos de la fuerza de las olas mediante la oración. El silencio y la meditación son los medios más eficaces para marchar por esta vía. Dios se vela siempre al hombre solitario y recogido. De esta forma se opera la separación necesaria entre la materia que os ha rodeado durante tanto tiempo envolviéndoos en sus tinieblas y el espíritu que nace en vosotros y os ilumina, porque él hará entonces que vuestra alma se aclare. Vuestro corazón lacerado recibirá entonces la luz que inunda. Ya no tendréis en vosotros convicciones, sino radiantes certezas. El poeta se expresa, el sabio medita, el justo actúa; pero el que se sitúa al borde de los mundos divinos reza, y su oración es al mismo tiempo palabra, pensamiento, acción…

original

Extraits de Séraphîta

« Si vous voulez habituer vos pieds à marcher dans le chemin qui mène au Ciel, sachez bien que les commencements en sont rudes, dit cette âme endolorie. Dieu veut être cherché pour lui-même. En ce sens, il est jaloux, il vous veut tout entier ; mais quand vous vous êtes donné à lui, jamais il ne vous abandonne.

« Je vais vous laisser les clefs du royaume où brille sa lumière, où vous serez partout dans le sein du Père, dans le coeur de l’Époux. Aucune sentinelle n’en défend les approches, vous pouvez y entrer de tous côtés ; son palais, ses trésors, son sceptre, rien n’est gardé ; il a dit à tous : Prenez-les ! Mais il faut vouloir y aller. Comme pour faire un voyage, il est nécessaire de quitter sa demeure, de renoncer à ses projets, de dire adieu à ses amis, à son père, à sa mère, à sa soeur, et même au plus petit des frères qui crie, et leur dire des adieux éternels, car vous ne reviendrez pas plus que les martyrs en marche vers le bûcher ne retournaient au logis ; enfin, il faut vous dépouiller des sentiments et des choses auxquels tiennent les hommes, sans quoi vous ne seriez pas tout entiers à votre entreprise.

« Faites pour Dieu ce que vous faisiez pour vos desseins ambitieux, ce que vous faites en vous vouant à un art, ce que vous avez fait quand vous aimiez une créature plus que lui, ou quand vous poursuiviez un secret de la science humaine. Dieu n’est-il pas la science même, l’amour même, la source de toute poésie ? Son trésor ne peut-il exciter la cupidité ? Son trésor est inépuisable, sa poésie est infinie, son amour est immuable, sa science est infaillible et sans mystères !

« Ne tenez donc à rien, il vous donnera tout. Oui, vous retrouverez dans son coeur des biens incomparables à ceux que vous aurez perdus sur la terre. Ce que je vous dis est certain : vous aurez sa puissance, vous en userez comme vous usez de ce qui est à votre amant ou à votre maîtresse.

« Hélas ! la plupart des hommes doutent, manquent de foi, de volonté, de persévérance. Si quelques-uns se mettent en route, ils viennent aussitôt à regarder derrière eux, et reviennent. Peu de créatures savent choisir entre ces deux extrêmes : ou rester ou partir, ou la fange ou le ciel. Chacun hésite. La faiblesse commence l’égarement, la passion entraîne dans la mauvaise voie, le vice, qui est une habitude, y embourbe ; et l’homme ne fait aucun progrès vers les états meilleurs.

« Tous les êtres passent une première vie dans la sphère des Instincts où ils travaillent à reconnaître l’inutilité des trésors terrestres après s’être donné mille peines pour les amasser. Combien de fois vit-on dans ce premier monde avant d’en sortir préparé pour recommencer d’autres épreuves dans la sphère des Abstractions où la pensée s’exerce en de fausses sciences, où l’esprit se lasse enfin de la parole humaine ; car la Matière épuisée, vient l’Esprit. Combien de formes l’être promis au ciel a-t-il usées, avant d’en venir à comprendre le prix du silence et de la solitude dont les steppes étoilées sont le parvis des Mondes Spirituels !

« Après avoir expérimenté le vide et le néant, les yeux se tournent vers le bon chemin. C’est alors d’autres existences à user pour arriver au sentier où brille la lumière. La mort est le relais de ce voyage. Les expériences se font alors en sens inverse : il faut souvent toute une vie pour acquérir les vertus qui sont l’opposé des erreurs dans lesquelles l’homme a précédemment vécu.

« Ainsi vient d’abord la vie où l’on souffre, et dont les tortures donnent soif de l’amour. Ensuite la vie où l’on aime et où le dévouement pour la créature apprend le dévouement pour le Créateur, où les vertus de l’amour, ses mille martyres, son angélique espoir, ses joies suivies de douleurs, sa patience, sa résignation, excitent l’appétit des choses divines. Après vient la vie où l’on cherche dans le silence les traces de la Parole, où l’on devient humble et charitable. Puis la vie où l’on désire. Enfin, la vie où l’on prie. Là est l’éternel midi, là sont les fleurs, là est la moisson !

« Les qualités acquises et qui se développent lentement en nous sont les liens invisibles qui rattachent chacun de nos existers l’un à l’autre, et que l’âme seule se rappelle, car la matière ne peut se ressouvenir d’aucune des choses spirituelles. La pensée seule a la tradition de l’antérieur. Ce legs perpétuel du passé au présent et du présent à l’avenir, est le secret des génies humains : les uns ont le don des Formes, les autres ont le don des Nombres, ceux-ci le don des Harmonies. Ce sont des progrès dans le chemin de la lumière. Oui, qui possède un de ces dons touche par un point à l’infini.

« La Parole, de laquelle je vous révèle ici quelques mots, la terre se l’est partagée, l’a réduite en poussière et l’a semée dans ses oeuvres, dans ses doctrines, dans ses poésies. Si quelque grain impalpable en reluit sur un ouvrage, vous dites : « Ceci est grand, ceci est vrai, ceci est sublime ! » Ce peu de chose vibre en vous et y attaque le pressentiment du ciel. Aux uns la maladie qui nous sépare du monde, aux autres la solitude qui nous rapproche de Dieu, à celui-ci la poésie ; enfin tout ce qui vous replie sur vous-même, vous frappe et vous écrase, vous élève ou vous abaisse, est un retentissement du Monde Divin.

« Quand un être a tracé droit son premier sillon, il lui suffit pour assurer les autres : une seule pensée creusée, une voix entendue, une souffrance vive, un seul écho que rencontre en vous la Parole, change à jamais votre âme. Tout aboutit à Dieu, il est donc bien des chances pour le trouver en allant droit devant soi.

« Quand arrive le jour heureux où vous mettez le pied dans le chemin et que commence votre pèlerinage, la terre n’en sait rien, elle ne vous comprend plus, vous ne vous entendez plus, elle est vous. Les hommes qui arrivent à la connaissance de ces choses, et qui disent quelques mots de la Parole vraie ; ceux-là ne trouvent nulle part à reposer leur tête, ceux-là sont poursuivis comme bêtes fauves, et périssent souvent sur des échafauds à la grande joie des peuples assemblés, tandis que les Anges leur ouvrent les portes du ciel.

« Votre destination sera donc un secret entre vous et Dieu, comme l’amour est un secret entre deux coeurs. Vous serez le trésor enfoui sur lequel passent les hommes affamés d’or, sans savoir que vous êtes là. Votre existence devient alors incessamment active ; chacun de vos actes a un sens qui se rapporte à Dieu, comme dans l’amour vos actions et vos pensées sont pleines de la créature aimée ; mais l’amour et ses joies, l’amour et ses plaisirs bornés par les sens, est une imparfaite image de l’amour infini qui vous unit au céleste fiancé. Toute joie terrestre est suivie d’angoisses, de mécontentements ; pour que l’amour soit sans dégoût, il faut que la mort le termine au plus fort de sa flamme, vous n’en connaissez alors pas les cendres ; mais ici Dieu transforme nos misères en délices, la joie se multiplie alors par elle-même, elle va croissant et n’a pas de limites.

« Ainsi, dans la vie Terrestre, l’amour passager se termine par des tribulations constantes ; tandis que, dans la vie Spirituelle, les tribulations d’un jour se terminent par des joies infinies. Votre âme est incessamment joyeuse. Vous sentez Dieu près de vous, en vous ; il donne à toutes choses une saveur sainte, il rayonne dans votre âme, il vous empreint de sa douceur, il vous désintéresse de la terre pour vous-même, et vous y intéresse pour lui-même en vous laissant exercer son pouvoir. Vous faites en son nom les oeuvres qu’il inspire : vous séchez les larmes, vous agissez pour lui, vous n’avez plus rien en propre, vous aimez comme lui les créatures d’un inextinguible amour ; vous les voudriez toutes en marche vers lui, comme une véritable amante voudrait voir tous les peuples du monde obéir à son bien-aimé.

« La dernière vie, celle en qui se résument les autres, où se tendent toutes les forces et dont les mérites doivent ouvrir la Porte Sainte à l’être parfait, est la vie de la Prière. Qui vous fera comprendre la grandeur, les majestés, les forces de la Prière ? Que ma voix tonne dans vos coeurs et qu’elle les change. Soyez tout à coup ce que vous seriez après les épreuves !

« Il est des créatures privilégiées, les Prophètes, les Voyants, les Messagers, les Martyrs, tous ceux qui souffrirent pour la Parole ou qui l’ont proclamée ; ces âmes franchissent d’un bond les sphères humaines et s’élèvent tout à coup à la Prière. Ainsi de ceux qui sont dévorés par le feu de la Foi. Soyez un de ces couples hardis. Dieu souffre la témérité, il aime à être pris avec violence, il ne rejette jamais celui qui peut aller jusqu’à lui.

« Sachez-le : le désir, ce torrent de votre volonté, est si puissant chez l’homme, qu’un seul jet émis avec force peut tout faire obtenir, un seul cri suffit souvent sous la pression de la Foi. Soyez un de ces êtres pleins de force, de vouloir et d’amour ! Soyez victorieux de la terre. Que la soif et la faim de Dieu vous saisissent ! Courez à Lui comme le cerf altéré court à la fontaine ; le Désir vous armera de ses ailes ; les larmes, ces fleurs du Repentir, seront comme un baptême céleste d’où sortira votre nature purifiée.

“Élancez-vous du sein de ces ondes dans la Prière. Le silence et la méditation sont les moyens efficaces pour aller dans cette voie. Dieu se révèle toujours à l’homme solitaire et recueilli. Ainsi s’opérera la séparation nécessaire entre la Matière qui vous a si longtemps environnés de ses ténèbres, et l’Esprit qui naît en vous et vous illumine, car il fera alors clair en votre âme. Votre coeur brisé reçoit alors la lumière, elle l’inonde. Vous ne sentez plus alors des convictions en vous, mais d’éclatantes certitudes.

« Le Poète exprime, le Sage médite, le Juste agit ; mais celui qui se pose au bord des Mondes Divins, prie ; et sa prière est à la fois parole, pensée, action ! Oui, sa prière enferme tout, elle contient tout, elle vous achève la nature, en vous en découvrant l’esprit et la marche. Blanche et lumineuse fille de toutes les vertus humaines, arche d’alliance entre la terre et le ciel, douce compagne qui tient du lion et de la colombe, la Prière vous donnera la clef des cieux. Hardie et pure comme l’innocence, forte comme tout ce qui est un et simple, cette Belle Reine invincible s’appuie sur le monde matériel, elle s’en est emparée ; car, semblable au soleil, elle le presse par un cercle de lumière.

Séraphita