Dauge (E:49-50) – tudo depende do homem interior

L’ésotérisme affirme nettement la responsabilité de l’homme : tous les maîtres et tous les sauveurs réunis ne parviendront jamais à libérer celui qui n’a pas, de lui-même, Tardent désir de se délivrer. Tout dépend, en effet, de notre énergie profonde, de notre volonté intime : sans elle, pas d’initiation, pas de réalisation, pas de salut. Angelus Silesius a des formules saisissantes — pour un chrétien — à ce sujet : « L’extérieur ne t’aide pas » (I, 62), « C’est en toi que Dieu doit naître » (I, 61), « Ressuscite toi-même d’entre les morts » (I, 63)… C’est donc dans la mesure où, devenu intérieur, l’homme prend conscience de sa vraie nature et de son vrai pouvoir que la mutation est possible, que l’échelle des résurrections peut être gravie. Le Bouddha, pour sa part, a vigoureusement attiré l’attention sur la responsabilité personnelle : « Brille pour toi-même comme ta propre lumière » (Dhammapada) ; « Soyez à vous-mêmes votre propre flambeau et [50] votre propre refuge. Ne vous confiez à aucun refuge en dehors de vous… » (Mahâparinibbâna Sutta, II, 33).

Ce doit être, au point de départ, une conviction et une intention ; peu à peu, l’intériorité s’ouvrant toujours davantage, la conviction devient vérité vécue, et l’intention, accomplissement. Le tout est donc de tourner notre regard et notre vouloir vers la source de notre être, le secret du Cœur, le sanctuaire de notre divinité : thème de cette « pré-méditation » qu’est la conversion, retournement ou redressement vers quelque chose d’essentiel que l’on sait être là. Citons encore le Pèlerin chérubinique (II, 162) : « Tourne tes rayons en dedans. Ah ! que seulement mon âme retourne et inverse ses flammes ! Elle sera bientôt, avec l’Éclair, éclair, et un seul être6. » L’énergie fondamentale est comme un feu : à sa dispersion vers l’extérieur, à son amoindrissement, s’oppose sa concentration, son accroissement à l’intérieur ; si elle persiste, cette inversion de son sens ordinaire produit de remarquables résultats : l’intensification de la conscience du Soi et la fusion avec le Divin. Que dit d’autre Râmana Mahârshi ? « Comme votre perspective est extravertie, vous avez perdu de vue le Soi. Il ne se trouve pas dans les objets extérieurs. Renversez votre regard vers l’intérieur de vous-mêmes, plongez en vous, et vous serez le Soi » (Enseignement, p. 179) ; et à la question : « Comment peut-on voir Dieu ? », il répond tout simplement : « En vous. Si votre mental s’intro vertit, Dieu se manifestera comme Conscience intérieure » (ibid., p. 183). L’ésotérisme correspond ainsi au travail de l’homme intérieur pour se conquérir lui-même et pour conquérir le Dieu éblouissant qui est caché en tout.

Yves Dauge