Le DRG Drshia Viveka (Comment Discriminer le Spectateur du Spectacle) de Shamkara
I Tout d’abord, la forme1 est perçue, et c’est l’œil2 qui perçoit3. —A son tour, l’œil est perçu ; le mental4 est maintenant le sujet percevant.
Le mental et ses modifications5 passent enfin dans la catégorie des objets perçus ; c’est le Spectateur (sâksin) qui, en dernier ressort, perçoit réellement6, — et ce Spectateur7), nul ne saurait le percevoir.
COMMENTAIRES
C’est par la connaissance directe et immédiate de l’âtman (ou du Soi) que l’on accède à l’état de délivrance.
Si l’on comprend la pleine signification du mantra sacré « tat tvam asi » (Cela, tu l’es, toi aussi), le but suprême de l’existence est atteint, mais pour interpréter correctement ce mantra, il est nécessaire de saisir au préalable la valeur exacte des différents mots qui le composent; les cinq premiers çlokas de ce traité expliquent le sens de « tu ».
N. d. T. : Pour le vedânta, les choses du spectacle sont, tout d’abord, classées en deux catégories : celles qui sont inanimées — celles qui sont animées ; c’est la première distinction qui frappe l’œil. Il ne conviendrait pas d’employer ici le qualificatif « inconscient » au lieu d’inanimé, car on ne trouve, dans le monde des apparences, rien qui soit absolument conscient, rien qui soit absolument inconscient.
Il n’existe, en fait, dans le spectacle que des degrés de conscience, car le mental, pour prendre connaissance (drçya) n’est, en définitive, qu’une modification du mental, et, partant, de la conscience da spectateur (drk).
Forme : par le mot forme (rûpa), on doit entendre tous les objets de perception sensorielle. ↩
l’œil : l’ œil représente ici tous les organes de perception : nez, oreilles, etc. … ↩
qui perçoit (drk) : si l’on dit que l’œil perçoit, ce n’est que dans un sens relatif, car l’œil est, à son tour, perçu par le mental. ↩
le mental : les organes sensoriels ne peuvent par eux-mêmes percevoir les objets qui leur correspondent; pour que la perception s’effectue, il est indispensable que le mental s’associe à ces organes. Dans la condition de sommeil profond, les organes sensoriels ne perçoivent plus rien, puisque, à ce moment, le mental a cessé de fonctionner. ↩
et ses modifications : le mental (manas) ou organe interne (antah-karana) a pour modifications
• — la boddhi (l’intellect supérieur);
• — l’ahamkara (le sens du moi);
• —le citta ↩
réellement: le mental, est, en effet, régenté par le Soi, l’Ordonnateur intérieur (antar-yamin). ↩
Spectateur : âtman (ou le Soi) est l’Hôte intérieur ; en définitive, c’est lui qui perçoit réellement. Chercherait-on un autre sujet qui perçût l’âtman, l’investigation se poursuivrait en une régression sans fin. Toutes les entités empiriques, depuis les objets grossiers jusqu’au mental, sont produites par l’ignorance, laquelle est insensible ; elles ont donc toutes la même nature : ce sont des objets. Le caractère subjectif de certaines d’entre elles ne doit pas faire illusion ; il n’est que relatif. Le Soi est le Voyant suprême ; il n’y a pas d’autre voyant que Lui : « La Connaissance du Connaisseur ne fait jamais défaut ». (brh. up. ↩