Walker : Théorie générale de la magie naturelle

Dans le reste de ce livre, je traiterai de plusieurs sortes de magies et de théories magiques ainsi que de divers arguments pour ou contre. Je m’efforcerai de retracer l’histoire d’une tradition de magie néo-platonicienne, dont Ficin est l’exemple, de ses liens avec d’autres types de magies et avec d’autres activités du même ordre, et des réactions défavorables qu’elle provoqua. Je me contenterai de discuter d’un très petit nombre d’ouvrages parmi la vaste littérature qui traite de la magie, j’espère qu’ils suffiront à montrer les principaux traits de cette histoire.

Cette tradition, telle que Ficin la laissa, comprenait deux sortes de magies, la magie naturelle, spirituelle du De V.C.C., et la magie démoniaque, à laquelle cet ouvrage ne fait qu’allusion mais qu’il est facile de découvrir dans ses autres écrits. La tradition avait donc des chances de se développer en des directions divergentes, ce qu’elle fit. La magie démoniaque, se combinant avec la magie planétaire du Moyen Age, conduisit à la magie ouvertement démoniaque, d’une inorthodoxie téméraire, celle d’Agrippa et de Paracelse. La magie spirituelle tendit à se fondre dans autre chose : la musique et la poésie, comme chez La Boderie ; le christianisme orthodoxe de Giorgi ; le christianisme non orthodoxe de Persio. A la fin du XVIe siècle les deux branches de la tradition se retrouvent dans l’art oratoire planétaire de Paolini et dans la magie pratiquée par Campanella.

Du fait que la structure logique des théories sur la magie, telle qu’elle est présentée dans les écrits du xvie siècle, est à la fois lâche et obscure, je veux ici proposer un schéma qui conviendra aux théories que nous allons étudier ; j’espère qu’il aidera à éclaircir la relation entre les divers sujets abordés dans la plupart des écrits sur la magie.

Les activités désignées sous le nom de magie naturelle avaient toutes une forte tendance à ne plus pouvoir se distinguer de quelque autre activité ayant reçu une autre appellation, plus adéquate ; la magie était toujours sur le point de devenir un art, une science, de la psychologie pratique ou encore et surtout une religion. Je ne parle pas ici d’un emploi vague ou élargi du terme — magia naturalis était parfois l’équivalent exact de la philosophia naturalis, comme, par exemple, la plus grande partie de la magie de Porta — mais d’un véritable empiétement des domaines de toutes ces activités, empiétement qui rendait la position du concept de magie naturelle très instable et qui eut finalement pour résultat sa disparition. Je m’efforcerai d’expliquer la façon dont la magie se confond avec ces autres activités à l’aide du diagramme ci-après, qui est destiné à indiquer la relation entre les thèmes principaux de la théorie de la magie naturelle.

L’influence planétaire peut s’exercer directement sur l’imagination de l’opérant, ou indirectement à travers une ou toutes les forces. Les effets peuvent être produits par n’importe laquelle des forces ou leurs subdivisions, ou par une quelconque de leurs combinaisons ; mais la vis imaginativa est presque toujours présente, car elle est la force centrale, fondamentale, et les autres ne sont habituellement utilisées que comme supports pour en accroître l’effet ou comme moyens de la communiquer.

Le moyen de transmission le plus courant dans tout le processus est l’esprit, cosmique et humain. Les effets peuvent se produire sur un être animé, ou inanimé (ou directement sur le corps) ; les planètes, considérées tantôt comme animées, tantôt comme inanimées (c’est-à-dire seulement leur corps), peuvent causer un effet de ricochet, choc en retour sur l’esprit et l’imagination de l’opérant. Sur un être animé, l’effet peut être soit subjectif (se cantonnant dans le ou les opérants), soit transitif (dirigé vers une ou d’autres personnes) ; dans les deux cas, il peut être, ou bien purement psychologique, restant à l’intérieur de l’imagination ou de l’âme, où psychosomatique, affectant le corps à travers l’imagination.



Ce schéma est valable pour une magie naturelle, non démo-nique ; mais il peut être modifié pour convenir à la magie démo-nique, si l’on remplace par des anges ou des démons les influences planétaires impersonnelles et «spirituelles». Les démons seraient alors attirés ou contraints par les diverses forces et produiraient leurs effets en agissant non seulement sur le corps et l’esprit mais aussi sur les parties supérieures de l’âme. Dans le présent schéma de magie naturelle, les planètes et l’opérateur ne sont censés agir directement sur rien de supérieur à l’esprit, qui est le véhicule de l’imagination. Les effets produits sur les choses inanimées ou directement sur les corps (sauf par la vis rerum) sont plus difficiles à expliquer que les effets psychologiques si l’on ne prend en compte un agent surnaturel (angélique, démoniaque ou divin) ; ceci est également vrai des effets psychosomatiques les plus curieux ou anormaux, par exemple les stigmates ou les maladies nerveuses, par opposition au fait de rougir ou de dormir. Il existe donc une forte tendance à cantonner les effets de la magie naturelle dans les catégories purement psychologiques, ou psychosomatiques les plus ordinaires. Les effets les plus miraculeux pourraient être expliqués comme naturels, mais seulement par la prise en compte d’une puissance dans l’esprit humain qui n’était généralement pas admise.

Les divisions A et B des vires imaginum, verborum, musices, rerum, ne représentent pas toutes la même distinction, mais elles ont ceci de commun : les forces A de toutes les choses sont ordinaires et universellement acceptées, et bien qu’elles puissent être utilisées à des fins magiques, elles peuvent produire, et produisent, des effets que nul ne considérait comme magiques ; alors que les forces B, bien que n’étant pas toutes nécessairement magiques, ne sont pas reconnues universellement comme réelles ou légitimes, et leur usage est pour le moins suspect d’être magique. Tout effet transitif produit par la seule vis imaginativa (par ex. la télépathie) est évidemment magique. Les types A et B de forces identiques ou différentes peuvent se combiner dans la même opération.

Les types A des vires imaginum, musices, verborum, peuvent produire des effets esthétiques, affectifs ou intellectuels par les moyens ordinaires de, respectivement, la peinture (ou tout autre art visuel), la musique ou le chant, l’éloquence ou la poésie ; le type A de la vis rerum peut produire des effets ordinaires à travers les qualités élémentaires de ce qui est appliqué, comme dans toute activité courante (par ex. la cuisine, ou la médecine non astrologique). Les emplois de ces formes A ne sont susceptibles d’être considérés comme magiques que si les influences planétaires sont combinées avec eux, c’est-à-dire s’il s’agit de peinture, de musique astrologiques, etc. La peinture, la musique et l’éloquence peuvent recevoir une force astrologique (s’ils viennent à exprimer le caractère, le ethos, d’une planète particulière) ; elle peut être octroyée à un processus élémentaire par l’emploi des correspondances traditionnelles entre les planètes et les qualités élémentaires.

Les forces de type B sont plus diverses et doivent être examinées séparément. La division B du vis rerum produit des effets à travers les qualités occultes des choses, c’est-à-dire leurs forces ou leurs vertus, autres qu’élémentaires ; on pense généralement que ces qualités sont dues aux planètes, correspondent au caractère d’une certaine planète et sont utilisées pour induire ou renforcer l’influence de la planète requise. Leur simple usage, sans intervention de l’imagination de l’opérant ou du patient, n’est pas nécessairement magique, comme l’emploi de médecines préparées astrologiquement qui n’ont d’effets que sur le corps ou l’emploi d’un aimant pour extraire un métal d’une blessure. Mais le classement de ces cas est très incertain car ce n’est que très rarement, pour ainsi dire jamais, que l’on peut exclure l’imagination avec certitude. En médecine la crédulité ou la foi du patient dans le remède est toujours d’une importance cruciale. On peut même, comme le faisait Gilbert, considérer que l’aimant agit comme une âme ou, plus précisément, comme un fragment de l’Ame de la Terre. Les emplois clairement magiques du type B du vis rerum se font quand il est dirigé, habituellement combiné avec d’autres forces, vers l’imagination de l’opérant ou du patient, comme quand, par exemple en magie ficinienne, des groupes de plantes, aliments, animaux, odeurs, solaires, joviens ou vénériens, sont utilisés en conjonction avec de la musique et des talismans planétaires. L’importance magique essentielle des qualités occultes réside dans le regroupement conséquent d’objets planétaires, qui peuvent alors être utilisés par les autres forces ; on peut, ainsi, rendre un tableau, une chanson ou un discours solaires en représentant des objets solaires (héliotrope, miel, coqs, etc.) ou on pourrait se contenter de s’asseoir et de les imaginer — dans les deux cas l’imagination deviendrait plus solaire. Ces groupes d’objets peuvent aussi inclure des êtres humains, que l’on peut utiliser de la même façon.

La division B de la vis imaginum produit des effets au moyen de choses telles que les talismans, les statues animées du haut du ciel, les ars notoria. La distinction entre les types A et B de cette force est, comme toutes celles que je fais, loin d’être claire et nette ; mais, entre les deux, cette différence existe. La force A d’une image est proportionnelle à la réussite, à la beauté de la représentation ou de l’expression de son sujet, même si cela est astrologique et destiné à servir un but magique. La force d’une image B réside uniquement dans ses affinités astrologiques ; ses formes ne sont souvent pas du tout figuratives (par ex. les sceaux d’ars notoria, les amulettes de Paracelse), et, même si elles le sont, l’exactitude ou la beauté de la représentation n’ajoute rien à leur efficacité6. Les autres forces, de l’imagination, des mots, de la musique, des choses, sont souvent appliquées lors de sa confection ou utilisés pour renforcer le pouvoir astrologique de l’image.

Du fait que, sur les talismans, sont inscrits habituellement des mots, des lettres ou des caractères aussi bien que des figures, ils se rattachent à la vis verborum et sont donc, comme elle, susceptibles d’être accusés de magie démoniaque. Les mots ou les lettres, n’étant pas représentatifs, c’est-à-dire n’ayant pas de correspondance point par point avec une planète ou un objet planétaire, ne peuvent être efficaces que par l’intermédiaire d’un être intelligent, qui comprend leur signification, à savoir un être humain, un ange planétaire ou un démon trompeur. Une des façons d’éviter cette accusation est d’en cantonner les effets à l’opérant ou aux patients humains qui voient aussi le talisman dont ils peuvent comprendre les signes, et qui devient efficace de par leur intelligence ; ceci exclut les effets sur les choses inanimées, sur le corps, ou à distance. L’autre moyen de s’en sortir est donné par la division B de la vis verborum. Ce type de force verbale repose sur une théorie du langage selon laquelle il existe un lien réel non conventionnel entre les mots et ce qu’ils désignent ; en outre le mot n’est pas simplement une qualité de la chose qu’il désigne, telle que sa couleur ou son poids ; il est, ou représente exactement, son essence ou sa substance8.

Par conséquent, une formule de mots peut n’être pas seulement un substitut adéquat pour les choses désignées : elle peut être encore plus puissante. Au lieu de rassembler des groupes d’objets planétaires, nous pouvons, en les appelant correctement par leur véritable nom ancien, obtenir une force céleste encore plus grande. Ici encore, bien que cet usage de mots se prête évidemment à la magie, il n’est pas nécessairement magique ; et bien qu’il soit distinct des emplois courants opérationnels du langage, tels que le discours affectif ou la poésie, il peut se combiner avec eux au cours d’une opération magique — un poème, par exemple, peut être à la fois une ouvre d’art expressive et une incantation, comme, disons, un hymne, qui exprime à la fois le caractère d’un dieu ou d’une planète et contient ses noms anciens et véritables.

La division B des vis musices demeure, pour autant que je sache, purement théorique. C’est une théorie qui propose de produire des effets au moyen de la correspondance numérique et mathématique entre les mouvements, distances et positions des corps célestes et les proportions des intervalles consonants en musique. On expliquait que cette correspondance fût physiquement opérationnelle, par l’analogie avec les vibrations sympathiques de cordes. Cette théorie fait partie d’une plus vaste théorie cosmologique, qui suppose que tout l’univers est construit sur ces proportions musicales et qui fournit la base théorique la plus courante pour la magie sympathique. Une des raisons pour lesquelles cette théorie n’aboutit pas à une musique concrète est que la représentation musicale d’un état quelconque donné du ciel ne fournissait qu’une seule corde et ne suggérait aucune mélodie ou aucun mode particuliers. Les pratiques magiques impliquant de la musique, comme celle de Ficin, avaient donc recours au vis musices A, qui, à travers le texte du chant ou de l’hymne, se combinait avec les vis verborum A et B.


Nous allons maintenant traiter des moyens de produire des effets. La magie fïcinienne suit les termes de ce schéma, se sert de la vis imaginativa combinée avec les vires imaginum B, verborum A et B, musices A, et rerum B. Les effets auxquels elle vise sont psychologiques et subjectifs. Cette description s’applique à la fois à la magie spirituelle du De V.C.C. et à sa magie angélique. Dans ce dernier cas, les démons seraient attirés par les divers vires.

Il faut se souvenir que «subjectifs» se dit des effets qui demeurent à l’intérieur de l’opérant ou de ceux qui prennent part à l’opération, c’est-à-dire subjectifs sur le plan individuel ou collectif, par opposition aux opérations transitives par lesquelles l’opérant impose un effet à quelqu’un sans le subir lui-même. La distinction entre les effets transitifs et subjectifs est importante de deux façons. Premièrement, si les effets sont subjectifs, le danger est bien moindre que la magie soit démoniaque, puisqu’elle ne comporte aucune transmission autre que la perception normale des sens — des images, des mots, de la musique ou des choses utilisées au cours de l’opération — tandis que si les effets sont transitifs, l’opération n’est pas perceptible par le patient, ou alors l’effet se produit sur un objet inanimé. Il est toujours possible de prétendre qu’un effet subjectif est accompli par les démons, mais il peut au moins s’expliquer facilement sans eux. Deuxièmement, seules les opérations transitives peuvent être socialement importantes ; la magie subjective peut être bonne ou mauvaise du point de vue de la morale ou de la religion mais, puisqu’elle n’affecte pas d’autres personnes, elle n’est pas un instrument de pouvoir à des fins sociales, politiques ou de prosélytisme religieux, comme celles que visaient, par exemple, Bruno ou Campanella. La magie subjective est donc beaucoup moins à même d’éveiller la crainte ou la persécution que la magie transitive.

L’usage de la magie transitive sur des êtres animés constitue un empiétement sur la psychologie pratique ; une telle magie est destinée à contrôler et à diriger les émotions des gens en modifiant leur imagination d’une manière spécifique et permanente. Il existait une nette tendance de ces techniques magiques à se centrer autour des sentiments sexuels, tant parce qu’ils étaient reconnus pour spécialement puissants et fondamentaux que parce qu’ils sont, en fait, plus étroitement liés à l’imagination que d’autres appétits naturels. Des traités de sorcellerie n’étaient pas loin du genre pornographique ; et Bruno fit une tentative remarquable pour mettre en ouvre une technique de contrôle de toutes les émotions, explicitement basée sur l’attirance sexuelle9. La magie subjective peut, elle aussi, empiéter sur la psychologie, la seule différence étant que les techniques s’appliquent à soi-même, comme dans la magie de Ficin ; le biais sexuel n’est pas apparent ici. Les empiétements sur la psychologie ne conduisent pas à une absorption de la magie dans une autre activité, car la psychologie appliquée n’existait pas au XVIe siècle en tant que discipline indépendante ; dans la mesure où elle était consciemment systématisée, elle faisait partie de la religion, et c’est une des façons, peut-être la plus importante, par laquelle la magie empiète sur la religion.

La production d’effets par la psychologie appliquée ou par la magie ne diffère de nombreuses pratiques religieuses qu’en ceci qu’aucune cause divine n’est prise en compte. La magie naturelle, non démoniaque, constitue donc une menace évidente envers la religion, car elle prétend produire les mêmes effets sans agent surnaturel ; sa conséquence logique est l’athéisme ou le déisme. La magie démoniaque ou angélique évite ce danger, mais est plus évidemment inacceptable pour un chrétien parce qu’elle est une religion rivale. La révélation chrétienne est unique et exclusive, et il n’y a de place pour aucune autre religion. Les chrétiens prudents et méfiants préfèrent donc considérer toute magie comme démoniaque et la condamner sans réserve. Les magiciens imprudents mais bien intentionnés tentent de parvenir à une magie non démoniaque afin d’échapper à la fois au Démon et à la flagrante inorthodoxie d’une pratique religieuse rivale. Mais leur magie naturelle, subjective, purement psychologique pouvait expliquer tous les effets d’une religion subjective et psychologique sans prendre Dieu en compte. Le catholicisme ordinaire n’était pas sans défense contre cette explication destructrice, car nombre de ses pratiques relevaient d’un ordre miraculeux qui ne pouvait s’expliquer ainsi avec autant de facilité ; elles produisaient des effets sur les objets inanimés (cloches, pain, récoltes), des effets psychosomatiques d’un genre surprenant (stigmates, guérison de maladies) et employaient des techniques étroitement associées à la magie, la vis imaginum et la vis verborum.

Cependant, pour les catholiques, demeurait la tâche insurmontable de démontrer que ces pratiques différaient essentiellement des opérations magiques produisant des effets quasi miraculeux similaires par des moyens similaires. Certains catholiques rigoureusement orthodoxes et certains protestants tentèrent de faire disparaître ou de démonter de telles pratiques, et de condamner comme magie démoniaque tout effet autre que purement psychologique et religieux. Mais, puisqu’ils devaient accepter les miracles du Nouveau Testament, leur position n’était pas tenable logiquement et, sans les miracles, ils couraient le danger de réduire leur religion à une technique psychologique sans Dieu, identique à la magie psychologique naturelle. Cette confusion entre la religion et la magie produisit alors le dilemme suivant : soit une religion miraculeuse mais clairement magique, soit une religion purement psychologique sans Dieu.

Ce dilemme ne fut bien sûr pas explicitement posé, mais il est clair que plusieurs auteurs opposés à la magie en étaient conscients et incapables d’y trouver une issue. Quelques très rares partisans de la magie, comme Pomponazzi, expliquaient tous les effets religieux, y compris les effets miraculeux, par des causes naturelles (psychologiques et astrologiques) ; et quelques magiciens catholiques très libéraux ne voyaient aucune objection à confondre pratiques magiques et religieuses. Je crois que l’importance historique de ces liens entre magie et religion est qu’ils amènent les gens à poser des questions sur les pratiques et expériences religieuses auxquelles ils n’auraient pas pensé autrement. En abordant les problèmes religieux par le biais de la magie, qui était au moins partiellement identique, ou exactement analogue à la religion, mais que l’on pouvait traiter sans révérence ni dévotion, ils purent apporter des réponses qui, vraies ou fausses, furent nouvelles et fructueuses.

John Levy