Temos livros bons o suficiente em qualquer biblioteca. Mas precisamente [Sra. Salzmann] nos dá o que nenhuma coisa escrita (livro ou carta) pode dar. Quando ela diz algo para a inteligência, é sempre depois de ter estabelecido as condições que nos permitem compreendê-lo também com o corpo e o coração. E como para cada indivíduo há um problema particular a ser resolvido, um desequilíbrio particular a ser corrigido, nenhuma literatura ou afirmação geral pode transmitir este ensinamento a outro. Se você viesse aqui e participasse, mesmo que por uma hora, destes exercícios, veria de que perguntas simples e devoradoras se tratam.
Tu me demandes une longue lettre sur les « enseignements » de Mme de S.1 Tu ne l’auras pas. C’est impossible. Il ne s’agit pas d’un « enseignement » didactique qu’on puisse mettre dans des lettres. Autrement, à quoi bon être venu ici? (Évian). Nous avons assez de bons livres dans n’importe quelle bibliothèque. Mais justement elle nous donne ce qu’aucune chose écrite (livre ni lettre) ne peut donner. Lorsqu’elle dit quelque chose pour l’intelligence, c’est toujours après avoir établi les conditions qui nous permettent de le comprendre aussi avec le corps et le cœur. Et comme pour chaque individu il y a un problème particulier à résoudre, un déséquilibre particulier à corriger, aucune littérature ni affirmation générale ne peut transmettre cet enseignement à un autre. Si tu venais ici, et que tu prennes part, même une heure, à ces exercices, tu verrais de quelles questions simples et dévorantes il s’agit. Sinon, c’est littérature. Quelle rigolade, ceux qui parlent d’ésotérisme. Il n’y a pas de secrets, pas de mystères qu’il faudrait cacher; au contraire, on voudrait crier au monde chaque petite chose qu’on découvre chaque jour : mais on ne peut pas. On ne peut pas, parce que le «monde» n’a pas d’oreilles pour entendre; il n’est pas préparé. Ces choses sont tues, parce qu’il n’y a pas d’auditeur pour les prendre. Et, comme disent plusieurs légendes du Hassidisme, les paroles qui ne trouvent pas d’auditeur pour les prendre – le don qui n’est pas reçu – le son dont nul ne peut se nourrir – reviennent, rebondissent vers celui qui les émet et peuvent le tuer.
J’essaie d’écrire des articles sur les « cours » de Mme de S. — simplement pour la propagande, pour amener des élèves. Je ne voudrais pas te faire l’injure de te présenter cette publicité comme une réponse à ta demande, mais je tâcherai de t’en envoyer les copies ou brouillons au fur et à mesure. Ci-joint un que j’envoie à Gleizes pour sa revue végétarienne (mais oui : si ça peut seulement amener l’élève, ça aura valu la peine de tremper ses doigts dans cette soupe) ; tu verras, c’est plein de prudence, ça tourne autour du pot, la Grosse Question y est à peine effleurée, mais il y a 2 ou 3 petites indications discrètes, si l’on cherche bien. … au moins on ne peut pas dire que c’est yoga, ou çoufisme, ou spiritisme ou gymnastique rythmique, ou psychanalyse, ou rien de catalogué.
Sur ces exercices mêmes, difficile de dire quelque chose, sinon qu’ils mettent en jeu tout l’être humain; mais si tu les voyais, tu pourrais ne voir que des gens assis à terre immobiles et comme figés dans l’abrutissement, complètement (ou essayant d’être complètement) décontractés, mais le torse droit, la colonne vertébrale en équilibre comme une pile d’osselets, — mais il faut être dans la peau de l’un d’eux pour savoir que c’est à ce moment qu’il est le plus éveillé, actif et présent, et quelles forêts vierges, quelles basses-cours, quelles tempêtes murmurent et mugissent en lui; ou encore qui se mettent à danser comme des possédés, soit inventant (découvrant en lui) un rythme organique soit sur un rythme donné ; ou encore… mais à quoi bon? tout cela ne serait que littérature.
N’espère pas que tu auras jamais un « enseignement », une révélation ou quoi que ce soit de réel sans un réel effort. D’autres partent pour le Tibet en quête d’un aléatoire « guru » (et parfois parce que ça les pose à leurs propres yeux) ; mais s’il s’agit de faire seulement le voyage Paris-Évian ou Paris-Genève, alors on trouve que c’est impossible ou que ça manque d’héroïsme. Quels drôles d’animaux nous sommes.
Mme. Jeanne de Salzmann. ↩