Jami: Nostalgie

En songeant à ta beauté, je suis tombé dans le trouble ; le désir causé par tes tresses m’a mis dans la perplexité. A quoi bon l’esprit, la richesse, du moment que l’amour de toi m’a privé de toute raison ? Tu m’as dit : « Laisse donc l’amour et prends la voie de la raison » ; pourquoi donc ferais-je une chose qui n’apporte que repentir ? Sans la rose qu’est ton visage, les nuits, dans le jardin, ma plainte au point du jour jette un appel aux oiseaux qui sont endormis. Lorsque tu es loin, ma demeure faite de terre et d’eau s’apprête à ne plus être qu’une ruine sous l’inondation de mes larmes. A mon âme prête à s’enfuir, le bruit produit par ton épée apporterait dans ma prison l’annonce de la délivrance. O Djâmi ! ferme donc les yeux : ses sourcils courbés en arcade ont déjà pratiqué cent brèches dans l’édifice de ta foi. (Djâmi)

Jami (1414-1492)